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Mesdames, Messieurs,

Chers clients et amis,

 

Il n’y a malheureusement pas que notre sympathique mais trop naïf député du vignoble alsacien qui pense que les trois chantiers post électoraux de notre Président de la République, Jacques Chirac, relèvent de l’humanisme le plus romantique, ou, peut-être de l’illumination d’un homme qui a décidé de se réincarner en Saint Christophe, le protecteur infaillible des conducteurs.

A la limite, Madame Bernadette Chirac, réputée à juste titre un peu cul béni sur les bords, pourrait se voir auréoler en Sainte Christophette. D’ailleurs, dans cette histoire de famille, elle siège au Conseil National de la Sécurité Routière chargé de travailler à la grande loi contre l’insécurité routière devenue le dada, le chantier N°1 post électoral officiel et monarchien de notre Président de la République qui s’autorise à oublier que les Français l’avaient d’abord élu pour la sécurité des biens et des personnes. (A Mulhouse, en 2004, la voiture du commissaire de Police se fait toujours caillasser quand elle pénètre dans certains quartiers !).

Ainsi depuis l’élection présidentielle, les performances gouvernementales se limitent à la baisse des morts sur la route et à la manne record des rentrées provenant des procès verbaux.

Tous ceux qui comprennent un peu le Président de la République qui a fait campagne électorale sur le thème de l’abaissement des impôts (alors que 1’Etat n’en avait raisonnablement pas les moyens) ne doutaient pas un instant du cynisme des autres mesures annoncées.

En fait, sous un emballage imparable se préparait une des plus formidables arnaques de l’automobiliste.

En effet, l’Etat exsangue ne sait plus comment faire pour rentrer des sous sans le dire. L’hebdomadaire Marianne » du 7 juillet 2004 a courageusement osé publier, dans ce monde de la presse majoritairement politiquement correct, des extraits d’un rapport édifiant d’un Comité Interministériel qui s’est réuni pour satisfaire aux exigences autocrate du Président de la République.

On constate avec effarement que nos fonctionnaires calculateurs font peu cas de la réduction prévisible des morts sur les rou­tes. Leur seul intérêt est la rentabilité des radars établie comme un business plan. A prévision très basse, ils espèrent faire tomber dans les caisses de l’Etat régulièrement 3,118 milliards d’Euros par an avec seulement 69 millions annuels de frais de maintenance. Pour ponctionner sans fin les conducteurs, les technocrates sans coeur comptent multiplier comme des petits pains les radars fixes (sans parler des mobiles) à l’instar du paysan bossu de Manon des Sources qui espérait s’enrichir sans limite en faisant reproduire à l’infini son unique couple de lapins.

Heureusement cela ne marche pas ainsi, et l’impudence, le sans gêne de nos dirigeants ont été impitoyablement sanctionnés à chaque élection.

Ainsi, avant même de connaître la publication de ce rapport plus que révoltant, les électeurs conducteurs avaient déjà choisi, pour les plus dépités de ne plus voter, et pour les autres, d’opter pour un vote sanction quelconque afin de réagir à ce racket habillé d’humanisme brut : sauver nos vies… en volant notre argent.

Et sauver notre moral ? Qui y travaille ?

En pleine hallucination notre gouvernement, à défaut d’autres résultats, n’affiche que sa détermination d’assainir les populations de l’alcoolisme, du tabagisme et les protéger des méfaits de l’automobile.

Malheureusement, l’activité fébrile de ces calamiteux intégristes, pour la plupart planqués dans les arcanes du pouvoir, four­voie dans des labyrinthes infernaux notre Etat hypocrite qui, pourtant, ne peut nullement se passer des milliards d’impôts indirects générés par les produits pétroliers, le tabac, l’alcool et les économies s’y attachant en amont et en aval.

Les résultats effrayants sont absolument inverses à ceux annoncés.

Lisez les journaux et observez autour de vous : l’alcoolisme, le tabagisme, les drogues de toutes sortes ne font que se dévelop­per en particulier chez les tous jeunes et surtout chez les jeunes filles. Quant aux délinquants de la route, pour grande partie produits par la répression accrue, on se voile la face, sachant que plus d’une voiture sur dix roule maintenant sans permis et sans assurance.

Mais les idées ne manquent pas pour mieux faire encore. Par exemple, le secteur viti-vinicole crée plus d’emplois que l’industrie automobile et aéronautique réunies. Qu’importe Le rapport Kopp, mesurant le coût social des drogues (!) en France, préconise la suppression pure et simple des vignobles dans l’intérêt du pays.

Mais le même rapport n’a pas prévu l’interdiction des alcools forts étrangers. Pourtant en 2003, nous avons battu les records d’importation et de consommation (plus de 1 300 000 hectolitres). On marche sur la tête et on continue de plus belle. On ne répètera jamais assez que le décret Pons, également cadeau post électoral qui a été pris par le gouvernement Juppé en 1995 (le 0,5gr d’alcool au volant) est une catastrophe absolue pour la société française, tant sur le plan culturel qu’écono­mique. De plus, aucune statistique ne prouve la dangerosité moyenne des conducteurs jusqu’à 0,8 gr. L’Angleterre qui est res­tée à cette norme est le pays où il y a le moins de morts sur la route.

On ne sait garder raison et s’attacher à des mesures permettant à tous de vivre normalement. Qui se rend compte dans les hautes sphères du degré de désabusement du citoyen ? Où attend-on vraiment que cela dégénère en révolte?

En tout cas, dans certains vignobles français, la gronde n’est pas loin d’exploser. Nous verrons alors ce que le gouvernement proposera à des régions entières traditionnellement viticoles et qui disparaîtront parce que nous n’avons pas eu la volonté, en particulier notre ministre de l’agriculture Mr Gaymard, de faire face aux 20 % de surproduction mondiale de vin pesant maintenant structurellement sur les marchés.

En attendant, notre brillant ministre des transports qui fait avancer le TGV à petite vitesse, spécialiste des leurres et des coups d’annonces, est déjà arrivé au forcing à abaisser l’alcoolémie au volant des conducteurs de bus à 0,2 gr. L’idée d’aligner tous les automobilistes à cette super norme fera son chemin et les restaurateurs continueront à perdre 20 % de bou­teilles par an. Bientôt les cartes des vins fins de France dans les établissements gastronomiques ne seront plus là que pour le décor.

Les quelques bouteilles encore bues proviendront d’un des beaux pays du Nouveau Monde et l’on en vantera à satiété la modicité des prix et le plaisir gustatif ressenti.

Le peuple français se mondialisera dans une super culture de non gastronomie où le vin sera considéré comme un élément obsolète sinon interdit. L’alcool sera délaissé en semaine, on ne boira plus un verre de vin à chaque repas. Mais les week-ends seront des moments délirants où la défonce sera la normalité comme cela se passe pour plus de 50 % de la popu­lation active dans les pays du nord de l’Europe.

Ailleurs aussi, mais plus en France, on apprendra encore aux jeunes que boire du vin tous les jours c’est bon pour la santé et bon pour le moral. Que cela fait partie des petits plaisirs de la vie, des moments importants dans les instants de par­tage et de générosité.

Pendant ce temps chez nous, les journalistes étrangers le soulignent déjà, les gens deviennent tristes, les restaurateurs aigris et les viticulteurs prennent conscience de devenir des êtres malfaisants et producteurs d’un breuvage néfaste à la santé. Ils en perdent leur fierté et leur raison d’être.

Pour ma part, même si mon analyse peut apparaître un peu cruelle de lucidité et de dépit, j’aimerais toujours rester ce vigneron gai et bon vivant, rabelaisien, joyeux de vivre et contaminant.

Pour le moment, il m’arrive encore de pouvoir rire de tous ces culs coincés qui oeuvrent avec acharnement à l’instauration de leurs idées prohibitionnistes, face à un défaitisme quasi général.

Aussi, pour oublier tout cela, à l’heure où j’écris ces quelques lignes, je retrouve mon pressoir où coulent en ce moment les premières Vendanges Tardives. Le millésime 2004 est généreux en volume et superbe en typicité. Vous aimerez certainement partager en toute convivialité et sans trop de modération avec vos amis et votre famille ces nectars qui vous sont maintenant chers au coeur: ceux de la Vallée Noble et du Grand Cru du Zinnkoepflé.

Alors, philosophes, laissons Monsieur Sarkozy ne boire que de l’eau, Monsieur Chirac aimer sa bière, Monsieur De Robien et certains autres ministres dépasser les limitations de vitesses sans en être responsables et Monsieur Douste-Blazy rappeler aux vignerons que son ministère de la santé gagnera la croisade anti-alcoolique même au prix de l’agonie des vignobles. L’histoire nous dira plus tard, dans quelle mesure ils auront été les acteurs agissants de la décadence accélérée de notre société.

Pour l’heure je vous adresse mes voeux les meilleurs pour 2005 et lève un verre de Grand Cru Zinnkoepflé à votre santé.

 Bonnes Fêtes et à bientôt de vos nouvelles

Seppi Landmann, votre vigneron

Soultzmatt, 28 octobre 2004

 

 

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